La citoyenne Marie Bonnevial (1841-1918)

Coordination scientifique : Corinne Bouchoux Véronique Fau-Vincenti

Marie Bonnevial interdite d’enseigner

Copie du jugement du Conseil Départemental du Rhône du 4 septembre 1873, anonyme, date inconnue, papier et encre, 29 x 19 (cm), Angers, © CAF.

Marie Bonnevial se voit signifier en septembre 1873 dans un jugement du Conseil départemental de l'Instruction publique du Rhône : « Interdiction absolue d'exercer la profession d'institutrice primaire » (page 3). Le mot « absolue » signifie que les cours particuliers, les activités de préceptrice sont aussi interdits. On notera la composition exclusivement masculine de la commission disciplinaire comprenant des juges, des représentants, des employeurs de Marie Bonnevial (l'inspecteur d'académie) et… des représentants de l'Eglise.

Le retour à l'ordre moral est concerté et organisé, et compte tenu de la législation encore en vigueur, les chances des libres penseurs sont bien minces. Ils espèrent créer un mouvement d'opinion en leur faveur. Pour beaucoup la sanction est à la clé : interdictions, absolues ou partielles d'exercer sont des condamnations banales. Marie Bonnevial perd son métier. Célibataire, elle perd aussi son gagne-pain et doit organiser sa survie. Son salut vient du soutien et de l'aide apportés par les libres penseurs, notamment Victor Hugo, et de son exil en août 1874 pour Constantinople.

Le retour à l'ordre moral

A Lyon la répression est moindre qu’à Paris, mais elle est symbolique, et non moins violente : la répression peut être policière, sans être sanglante, et machiavélique, et prendre des formes juridiques aussi imparables que brutales.

Marie Bonnevial, adepte depuis 1869 du mouvement de la Libre pensée refuse avec d’autres institutrices et instituteurs de donner l’instruction religieuse obligatoire à cette époque. Des parents d’élèves aident les militants en demandant que l’enseignement donné à leurs enfants soit dépourvu de cette instruction.

Copie d’une lettre de Victor Hugo à Marie Bonnevial du 17 septembre 1872, anonyme, date inconnue, papier imprimé, 21 x 13,5 (cm), Angers, © CAF.

Sermonnée par son supérieur, Marie Bonnevial se trouve poursuivie en justice sur plainte du préfet du Rhône. Le verdict est impitoyable : « Interdiction absolue d’exercer la profession d’institutrice primaire est faite à Mlle Bonnevielle, dite Bonnevialle ».

Victor Hugo soutient Marie Bonnevial

COPIE d’une lettre de Victor Hugo
adressée
à Mademoiselle Bonnevial
le 17 septembre 1872.

Mademoiselle,
La réaction vous frappe, là-bas à coup d’épingle, ici à coup de massue.
Continuez l’œuvre sainte. Restez la patience sans la faiblesse, la résignation sans l’abaissement.
Tous les honnêtes gens vous admirent : moi je vous bénis.
(signé) Victor Hugo
Paris le 17 septembre.