« En revenant de l’expo »

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Palais de l’Education, anonyme, 1900, papier imprimé, 22 x 15 (cm), Montreuil, Musée de l’histoire vivante, © mhv/2004. 

Les expositions universelles sont passées à la postérité pour les constructions d'envergure et les travaux dont elles se sont accompagnées. Invisibles dans les espaces urbains, de nombreux débats réunissent des protagonistes du monde entier… Marie Bonnevial préside la deuxième section Education de l'Exposition universelle de 1900 et sera rapporteur pour la partie « travail ».

Le travail en général, et celui des femmes en particulier, occupe un statut ambivalent. Il permet aux femmes une certaine indépendance financière. Selon Marie Bonnevial, « l'affranchissement économique de la femme est le point de départ et la base de sa totale libération ».

Là où le bât blesse, c'est que le travail est aussi un lieu d'aliénation, d'exploitation, de difficultés. Marie Bonnevial, fine connaisseuse du monde du travail, militante syndicale, œuvre d'arrache pied pour améliorer les conditions de travail et les modes de régulation des conflits du travail.

L'exposition de 1900

L’exposition universelle qui se tient à Paris du 14 avril au 12 novembre 1900 remporte un vif succès avec près de 50 millions de visiteurs.

La porte monumentale de Binet, délire de virtuosité entre art nouveau et palais des milles et une nuit, ouvre sur une exposition baroque où se presse une foule bigarrée à la recherche de distraction en ces temps de morosité politique où l’affaire Dreyfus s’éternise. Toutes les nouveautés et les « progrès » techniques sont ainsi mis en scène glorifiant le passage de l’atelier à celui de l’usine et de la production de masse. L’ère industrielle confine à l’âge du renouveau avec l’ouverture des 10 km de la ligne Vincennes-Maillot du métropolitain, avec l’intensification de l’éclairage électrique, avec les projections de cinématographe, avec les découvertes médicales qui vont bon train. « La rue de l’avenir », innovant un des premiers tapis roulant laisse défiler dans un long cortège ombrelles et chapeaux... l’été fut très chaud cette année là, près de 38,5° le 20 juillet.

Fête des techniques nouvelles et célébration du progrès, l’exposition universelle de 1900 est inaugurée par l’ouverture du Pont Alexandre III, du Petit Palais et du Grand Palais. La  « fée électricité » éclaire un immense palais de verre. Les films de Louis Lumière et de Georges Méliès sont projetés sur un écran géant de 25 m sur 15 m. Les beaux-arts consacrent le triomphe de l’impressionnisme et du symbolisme ; en architecture, l’art nouveau ou le modern style tient une place toute particulière et déborde sur les arts décoratifs,  mobiliers, bijoux, décorations, affiches etc., autant d’éléments qui  apparaissent en courbe, presque en mouvement à l’image du cinéma. Les fabricants d’automobiles sont réunis (Peugeot 1898, Renault 1898 – Ford 1892 – Fiat 1899) et exposent leurs premiers modèles dédiés à une riche clientèle. Les colonies, largement représentées, sont concentrées au Trocadéro (Antilles – Asie Française, Afrique et Nouvelle Calédonie) … des reconstitutions de village comme ceux du Dahomey  fait  des huttes en peau de requin du Dahomey, ou celle d’un souk tunisien rencontrent un vif succès. L’avènement affirmé de l’orientalisme et en particulier du japonisme fait également de nombreux émules.

Marquant le siècle finissant, l’exposition universelle de 1900, toute en splendeurs et extravagances, éclaire et anticipe  sur le siècle qui commence  et ne se contente plus d’être une rigoureuse exposition des technologies… et si de très sérieux et doctes techniciens de toutes les sciences s’y réunissent toujours en savants en congrès, l’aspect  parc d’attraction et « foire au progrès »  s’y affirme nettement dans un sentiment jubilatoire de fin de siècle – fin de cycle.

Les Actes de l'Exposition de 1900

Dans les actes de l’exposition, les propos de Marie Bonnevial sont introduits par un orateur. Dès le début du siècle, la pénétration des femmes dans de nouveaux domaines interpelle. Comment nommer les femmes qui accèdent à des postes jusqu’alors réservés aux hommes ? Avec humour, la question est posée en 1900… la question de la féminisation des noms de métiers et des activités se pose déjà.

« Mes chers collègues, nous commençons maintenant notre travail […]. La première question à l’ordre du jour est la question économique : « égalité des salaires ». Vous avez tous entre les mains le résumé des vœux des propositions adoptées par les sections du congrès. Je donne la parole à Mlle Marie Bonnevial, rapporteur, - nous n’avons pas encore le substantif féminin, j’ai presque envie de le faire et de le dire : rapporteresse de la première section, qui va nous donner un exposé des vœux et des propositions. »

Rapport de Mlle Marie Bonnevial
Rapporteur

« La Commission d’organisation du congrès a cru devoir donner aux questions de travail la première place de son programme parce qu’elle estime que l’affranchissement économique de la femme est le point de départ et la base de sa totale libération… »

Source : Les Actes de l’exposition de 1900. Ministère du Commerce, de l’Industrie, des Télégraphes. Direction générale de l’exploitation. Congrès international de la Condition et des droits des femmes, Paris, 5-8 septembre 1900, Paris, © BMD.