La Grande Guerre

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Bienheureuse Jeanne d'Arc, Protégez nos armées ! Sauvez la France !, anonyme, reproduit dans l'Echo de la Ligue Patriotique des Françaises 1914, Paris, Archives de l'Action catholique des femmes, © Action catholique des femmes.

La Grande Guerre a constitué un moment particulier dans l'histoire de la Ligue patriotique des Françaises. L'opposition aux régimes impies, qui caractérise la ligne d'avant-guerre, redoublée par un refus très clair du suffrage féminin, est abandonnée au lendemain du conflit mondial. En quatre ans, la position de l'association a évolué sous l'effet d'une prise en charge de plus en plus importante des populations civiles et militaires, souvent en concurrence avec les autres organisations féminines laïques et les pouvoirs publics.

Dès l'automne, la Ligue soutient la Belgique envahie. Elle met en place des ouvroirs pour les femmes au chômage, organise des ventes pour récolter des fonds. Des pèlerinages sont organisés à Lourdes, Paray-Le-Monial, Sainte Clotilde pour accompagner l'effort de guerre, qui donnent au conflit une dimension eschatologique. Mobilisant son réseau de comités, la Ligue répond aux demandes des familles sur les prisonniers et personnes déplacées en créant  un service de renseignement.

Adoptant une position qui concilie le patriotisme des mouvements conservateurs et le pacifisme prôné par le pape Benoît XV, elle souhaite la « Paix par la victoire ».

Les ouvroirs en temps de guerre

Face à la misère de nombreuses femmes sans ressources du fait du départ des maris au front ou du chômage, les dirigeantes de la Ligue reprennent les ouvroirs pour donner du travail aux femmes et fournir du linge aux soldats et aux aumôniers militaires.

Durant l'année 1916, la ligue verse ainsi 27 950 francs aux ouvroirs. Elle paie également des ouvrières à domicile. En 1917, c'est 30 685 francs qui sont versés aux ouvrières des ouvroirs. La Ligue participe également à la Fédération des organismes de travail, où elle est représentée par la conférencière Irène de Valette qui en est la secrétaire générale.

Le savoir-faire acquis dans les ouvroirs avant-guerre est reconverti au service de la patrie en danger.

Les ventes de la Ligue

Dès le début des hostilités, les dirigeantes mettent leur savoir-faire de dames patronnesses au service de la patrie. Les ouvroirs servent à fabriquer non seulement du linge d’autel mais aussi des lainages et vêtements pour les soldats. Les ventes ont lieu régulièrement et sont l’occasion de récolter de l’argent pour les soldats ou les aumôniers au front en écoulant la production des ouvroirs.

Nous ne disposons plus de photos de vente durant la guerre. En revanche, il est probable que les ventes organisées ressemblent à celles d’avant-guerre au secrétariat de la LPDF.

Pèlerinage

Afin d’attirer la miséricorde divine, les dirigeantes de la Ligue organisent dès le début des hostilités des pèlerinages et prières collectives. La guerre est présentée comme un châtiment divin que la France a attiré sur elle par sa politique anticléricale. Il faut donc, selon les ligueuses, faire œuvre de réparation. Suivant une division sexuelle du travail, la femme prie et l’homme combat.

La tortue déchaînée, anonyme, avril 1917, Paris, Archives de l'Action catholique des femmes, © Action catholiques des femmes.

Service de renseignement

Un aspect peu connu de l’action des associations durant la guerre est celui du renseignement auprès des familles. Par son réseau très étendu dans toute la France – et dans les colonies – mais aussi par les liens qu’elle entretient avec les aumôniers au front, la Ligue maintient des relations entre les familles et les soldats au front et entre les habitants des régions envahies et ceux restés à l’arrière.

Dès 1916, le service de renseignement est créé pour faire face aux demandes des familles. Un petit bulletin, La Tortue déchaînée, est publié à cette occasion. Un seul exemplaire ronéotypé de ce bulletin a été conservé aux archives. Nous ne savons pas à qui il s’adresse, ni à combien d’exemplaires il est tiré. Rédigé dans un style enfantin, il est probablement codé et destiné à fournir des renseignements sur les prisonniers de guerre.

Ci-dessous, le texte de déclaration en préfecture de l’association du service de renseignement.

Copie de la lettre envoyée par la secrétaire générale au préfet, le 31 janvier 1916 (H568)

"Paris, le 31 janvier 1916

Monsieur le Préfet,

L’association de la Ligue patriotique des Françaises (dont les Statuts ont été déposés à la Préfecture de Police en 1902) a dû, pour répondre aux demandes nombreuses de ses adhérentes, organiser un service de recherches pour les militaires disparus et les familles dispersées. Ce service de recherches transmet aux sociétés spéciales les demandes qui lui sont adressées, fait des enquêtes dans les camps allemands, auprès des rapatriés et communique les résultats obtenus aux intéressés. Ce service est absolument gratuit il se développe de jour en jour. C’est pourquoi nous croyons utile de faire une déclaration régulière pour cette nouvelle branche de notre Association qui a nom : Ligue patriotique des Françaises service des Recherches.
Le bureau est ouvert chaque après-midi, le vendredi excepté.

Veuillez recevoir, Monsieur le Préfet, l’expression de nos sentiments très distingués."