1978-1981 : l’envol politique

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Yvette Roudy candidate du PS pour l’élection législative dans la 2e circonscription de Lyon, anonyme, 1978, affiche, Angers, CAF, © CAF. 

FONDATION DU PS

En 1978, les temps ont changé. La place des femmes a évolué, la communication politique se professionnalise. Yvette Roudy apparaît comme « candidat du parti socialiste », tournure qui fait d'elle un homme en politique, la masculinise en quelque sorte. Nulle trace sur ces affiches du féminisme d'Yvette Roudy au sein du PS. Les femmes – cet exemple le montre - sont bien « encadrées » : par Mitterrand, sur la gauche de l'affiche, par le suppléant, sur une autre affiche.

Ce troisième essai est à nouveau un échec.

En revanche, Yvette Roudy est bien placée sur la liste du PS pour les premières élections européennes au suffrage universel. Le scrutin proportionnel et une sorte de quota de 30 % ont permis l'élection d'une vingtaine de femmes sur 81 députés. Entre 1979 et 1981, Yvette Roudy siège au Parlement européen et vit une expérience particulièrement enrichissante.

Une féministe au PS

En 1975, « année de la femme » décidée par l'ONU, « pour y voir plus clair », Yvette Roudy écrit La Femme en marge. Elle obtient de Mitterrand une préface de soutien, dans laquelle notamment il loue cette « militante qui, depuis dix ans, n'a cessé de réfléchir et de lutter à la fois sur deux fronts : le féminisme et le socialisme » et avoue, « sur le fond du débat, je ne peux que lui [Yvette Roudy] donner raison : il existera une vraie société socialiste le jour où la femme ne sera pas seulement reconnue par nous comme une égale, mais comme différente, c'est-à-dire où nous n'essaierons plus de lui imposer . . . notre propre modèle, mais où nous accepterons qu'elle invente le sien ». Le congrès de Suresnes, en 1974, accepte un quota féminin de 15 % et la création du secrétariat national aux droits de la femme, dont Yvette Roudy est devenue la première secrétaire nationale. Le congrès de Nantes (juin 1977) a soutenu « une Convention Nationale sur les Droits de la Femme », qui adopte le 15 janvier 1978 un Manifeste du Parti socialiste sur les droits des femmes orientant le parti sur des principes féministes assez larges. Le Manifeste a été publié dans Le Poing et la rose, février 1978, et en brochure en 1979 sous le titre, Féminisme, socialisme, autogestion.

Le conflit entre féminisme et socialisme a déjà une longue histoire, comme le montrent les recherches d'un jeune Américain, Charles Sowerwine, dont la thèse, Les Femmes et le socialisme, est traduite et publiée aux Presses de la fondation nationale des sciences politiques en 1978. Cet ouvrage appuiera la pression féministe au sein du PS ; Yvette Roudy s'y réfèrera souvent.

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Yvette Roudy et de Gérard Collomb en vue des élections législatives pour le PS, anonyme, 1978, Angers, CAF, © CAF.

Un parachutage avec un suppléant plein d'avenir

Gérard Collomb apparaît sur cette affiche des législatives de 1978.  Photo un peu ambiguë montrant une Yvette Roudy à l’écoute de son adjoint, qui, contrairement à elle, est un « local » (né à Chalon-sur-Saône, professeur agrégé de Lettres classiques, notamment au lycée Jean Perrin, dans le 9e arrondissement). Leurs noms bénéficient d’ailleurs de la même taille de caractères. Gérard Collomb est certes encore un peu jeune (il est né en 1947) et fait là sa première campagne personnelle. Il est élu au conseil municipal de Lyon, ville tenue par la droite, depuis 1977. Il sera élu député lors de la vague rose de 1981. Il prendra la mairie du 9e arrondissement en 1995, et sera élu maire de Lyon en 2001, réélu en 2008. Une brillante carrière qui passe par l’Assemblée (de 1991 à 1988) et par le Sénat (depuis 1999), et par l’Europe, avec la présidence d’Eurocities, réseau des 130 métropoles les plus importantes d’Europe, depuis 2006. Comme Yvette Roudy, il soutient aujourd’hui la tendance de Ségolène Royal au PS.

1979-1981 : députée européenne

Que retient Yvette Roudy de son mandat de parlementaire européen ? Dans ses mémoires, elle n'insiste pas sur les aléas liés aux transports. Yvette Roudy réclame très vite, dès la première session, une commission dédiée aux femmes. Simone Veil, présidente du parlement, soutient cette demande. Des Allemandes l'appuient et en octobre 1979, cette commission est créée.

Le but est de faire un état comparatif de la situation des femmes et de réduire les inégalités. Selon l'historien Yves Denéchère,  Yvette Roudy souhaite « modifier la composition de la Commission européenne ». Bruxelles joue le jeu et donne des statistiques sexuées. Le rapport aboutit au cours de l'hiver 1981 après bien des compromis. La presse salue le travail effectué par Yvette Roudy. Brillant au palmarès des présences, elle consacre deux semaines par mois à son mandat européen, soit beaucoup plus que la moyenne masculine.