Aux côtés des médecins féministes
Continuer d’aider les femmes
Malgré les avancées obtenues avec la reconduction définitive de la loi Veil en 1979, les difficultés subsistent pour les femmes qui souhaitent avorter (Fig. 1). En effet, l'application de la loi est inégale : certains centres d'IVG posent encore des conditions strictes et maltraitent parfois les femmes (Fig. 3). Le délai légal pour avorter reste restrictif en France, par comparaison avec les voisins européens comme l'Angleterre ou la Hollande. La plupart des associations qui avaient milité pour le droit à la contraception et à l'avortement se dissolvent progressivement à l'aube des années 1980. Face aux inégalités sociales et géographiques, les médecins continuent cependant de s'organiser et d'aider les femmes, certains acceptent de pratiquer des avortements après le délai légal, hors des structures hospitalières (Fig. 2) ou aident les femmes à partir vers l'Angleterre ou la Hollande. Les médecins tentent aussi de combler les manques en matière d'éducation sexuelle.
Le remboursement de l’IVG
Devant les inégalités sociales d'accès à l'IVG et devant le refus d’un droit qui ne serait accessible qu'aux femmes les plus favorisées, les médecins se mobilisent pour le remboursement de l'IVG au début des années 1980. Le Syndicat de la médecine générale (SMG) intervient en faveur de ce droit (Fig. 4). La victoire de la gauche en 1981 et la formation d’un nouveau gouvernement laissent espérer une adoption rapide de l'avortement remboursé par la sécurité sociale. Après un premier échec en 1982 (Fig.5), il faut attendre 1983 pour que la loi portée par Yvette Roudy, ministre des Droits de la femme, soit enfin adoptée après plusieurs rejets par le Sénat.
Danielle Gaudry (née en 1950)
Danielle Gaudry grandit dans une famille d’instituteurs proches du parti communiste. Dans sa jeunesse, elle est marquée par la guerre d’Algérie et vit les évènements de 1968 pendant ses études de médecine. Pendant ses stages en gynécologie, elle est confrontée aux avortements clandestins, ce qui l’amène à militer au Mouvement pour la liberté de l’avortement et de la contraception (MLAC), où elle pratique la méthode Karman. Elle devient responsable du centre local du Planning familial à Maisons-Alfort, puis co-présidente du MFPF dans les années 2000, où elle représente une ligne plus politisée et intervient aussi bien auprès des ministères que dans les prisons, pour y faire de la prévention autour du VIH.
Joëlle Brunerie-Kauffmann (née en 1943)
Issue d’un milieu catholique, Joëlle Brunerie-Kauffmann choisit de se spécialiser en gynécologie et découvre pendant ses études les milieux militants de gauche. Ayant subi un avortement clandestin, elle milite au Groupe Information Santé (GIS) pour la libéralisation de l’avortement et au Planning familial. Avec les autres médecins du GIS, elle découvre la méthode Karman et forme d’autres médecins engagés. Elle se reconnaît davantage dans ce type de militantisme que dans les mouvements plus légalistes comme le Planning familial. Toujours militante aujourd’hui, Joëlle Brunerie-Kauffmann continue le combat en faveur de l’IVG et des droits des femmes.